ARGENS vallée de sourn-escapade moto-2016
Une escapade remarquable en moto sur les bords de l'Argens. Cap sur CORRENS
Départ aux aurores (il est 10h30, mince déjà !)... casqués, rembourrés, du bon cuir qui tient bien chaud, gantés épais.... Vivent les joies de l'été. Nous décollons de Velaux plein gaz, direction Vauvenargues... La moto se colle au bitume et ronronne joyeusement.
Je me laisse porter, je hume et j'ouvre grand les yeux par dessus l'épaule gauche du pilote... Je me sens délicieusement bien, un peu ailleurs...
Laurent profite de ma distraction pour improviser et sortir d'Aix vers le Tholonet.... je lui tape sur l'épaule.
- Oh c'est pas là, nous, on va à Vauvenargues !
Pilote égal chef de bord. Il lève sa visière, se retourne. Je pouffe de rire. Il a un look horrible avec son auvent qui lui mange le front... Comment voulez-vous que je prenne au sérieux un pilote ainsi casqueté. En plus, il dit n'importe quoi, du genre,
- Pas grave, on trouvera bien un croisement sur la gauche pour rejoindre notre route...
J'en suis pas si certaine. De toute évidence à babord c'est la Sainte Victoire à traverser. À ma connaissance, y'a pas de tunnel. Heureusement, il n'a pas pris la route des Alpes. Alors le mal n'est pas bien grand.
Et voilà le Tholonet qui s'annonce. L'arc qui chemine à Velaux se retrouve ici à travers vignes et forêts et terres de roche. Y'a un monde fou, des randonneurs en route, en pause, en panne de repères, des fondus qui dévorent leur carte IGN. Et nous fièrement dressés sur nos deux roues, on traverse ce petit monde futile. Notre allure tranquille nous amène un peu d'air et c'est un roulage très agréable.
La route est tranquille, la lumière est belle. Une allure sympathique pour avancer sans bousculade et sentir l'air nous traverser le cou, ou le visage. Du coup quel confort sur nos selles.
Nous débarquon éblouis dans les vignobles dits "Sainte Victoire". De beaux plans de vigne, robustes, feuillage brillant et dense. Les raisins sont irrisés de rose sous le beau soleil de Provence. Va falloir organiser une escapade dégustation à l'automne. Tout cela est fort prometteur. Et si joli. Entre vignobles généreux, que dominent les hauteurs de la Sainte Victoire et la terre rouge sang qui borde ses contreforts. Que de couleurs, que de richesses accumulées par la vieille dame. Des rangées de roches grises lui font comme des perles autour du cou. Mais au fait ça lui fait combien à la duchesse Sainte Victoire ? Si j'en crois les profondes rides qui creusent les alignements de roche, ça doit faire au moins perpète... Sa surface est tavelée, décidément c'est bien une peau de vieille. Mais quelle allure ! Un bien beau monde à fréquenter !
Barjols nous déçoit. Il y a dans cette ville, un je ne sais quoi de sinistré malgré ses innombrables fontaines et sa tannerie désaffectée. Toutefois, cette ville nous réserve un étonnant moment de pur bonheur. C'est arrivé en passant devant la boutique d'un artisan du cuir. Nous restons tous les deux scotchés d'admiration devant la vitrine, casques et blousons en main.
- Tu crois que c'est différent à porter des chaussures comme ça ?
Laurent baisse les yeux, relève la pointe de sa godasse qui ouvre grand la gueule... Hé oui, la pédale moto vient de lui donner un coup fatal.
- Je crois que je vais entrer, pour voir.
La boutique est minuscule et toutes sortes de chaussures plus finement cousues, plus joliment travesties les unes que les autres. Avec un large choix pour les dames et les enfants... Mais y'a aussi pour les Messieurs. Une jeune femme cachée au fond de l'atelier apparait. Laurent va-t-il se laisser séduire ?
Elle propose à Laurent d'essayer pour se situer précisément dans sa taille. Le voilà qui chausse d'exquis souliers... Si vous aviez vu son expression béate, ses grands yeux clairs devenus presque sombres, reflets éclatants. Le voilà au bord de l'extase. Au top pour entrer dans le vif du commerce.
Imaginez son pied qui tourne et retourne avec délicatesse, son expression très concentrée, émerveillée, mais il ne va pas dire oui tout de suite. Faudrait pas céder trop vite, ça romprait le charme. Corsons un peu la relation qui s'annonce avec des exigences déjà.
- Ce serait possible de coudre une bande sur le dessus du pied gauche ? C'est à cause du levier de vitesses de la moto, enfin la pédale. La dame lève un sourcil, pas certaine d'avoir bien compris. Roulerait-on en moto à pédale ?
Mais elle est commerçante d'abord.
- Pas de problème. Je vous fais une bande un peu décor qui servira de renfort sur les deux chaussures.
Laurent très péremptoire.
- Non, juste sur la chaussure gauche. L'autre c'est pas la peine.
Sourcil interrogarif de la dame. Elle doit avoir des muscles en béton sur les yeux.
- Mais ça va pas faire bizarre ?
Et Laurent fin connaisseur.
- Jamais de la vie. C'est courant sur les chaussures moto. Ce serait bien si vous pouviez faire ça.
La dame ne semble guère convaincue Ça doit défriser son sens de l'esthétique, mais ...opération séduction commerciale oblige.
Les voilà à tergiverser sur le coloris du cuir, celui de la bande, sa forme... A ce stade je les abandonne et me réfugie au bar de la place.
Plus d'une demie-heure plus tard, je vois arriver un Laurent franchement épanoui.
- Alors tu les auras quand tes chaussures orthopédiques ?
- en septembre...
- Et, c'est cher ?
- Un peu....
il se commande illico une bière pression. Histoire de noyer le poisson.
Je n'insiste pas. Je ne veux pas me laisser pourrir par le blues de la Blue Card. Et puis Laurent a l'air si comblé. Je m'attendris en imaginant ses arpions grassouillets qui vont se tenir bien au chaud tout l'hiver.
Chateauvert puis Correns, notre hébergement. Une quinzaine de kilomètres de roulage à prévoir, que nous mettrons deux heures à parcourir. Pas qu'on se soit perdu mais c'est le milieu d'après-midi et on a toujours pas fait honneur à mon pique nique. Alors on s'attarde dans les chemins et les sous-bois à la recherche d'une planque repas idéale. Qu'on finit par trouver à l'entrée d'une propriété privée et au bord de la rivière.
Dès les premiers tours de roue, Correns nous séduit. Nous logeons dans une maison immense entourée de belles terres en terrasse, à une centaine de mètres du coeur du village. Notre chambre directe dans le jardin est isolée et nous nous sentons presque chez nous. C'est vraiment chouette.
Le seul resto de Correns est fermé le mercredi soir. Du coup nous ferons trois kilomètres à pieds à travers le vignoble pour profiter d'une cuisine mobile sur un terrain où sont installées tables et chaises au bord de l'Argens. Pas un seul moustique en vue, ni en oreille. Incroyable non ? Repas très honorable.
Retour à la nuit avec la pleine lune sur notre cap. Une belle traversée ce vignoble en nuitée. Et ma cheville pour ce premier périple de sept kilomètres sur terrain mou et plat se comporte admirablement.
Nous avons fait notre longue rando à pied le jeudi... je me sentais au top, fallait bien que je m'y colle, enfin....
Nous partons du jardin... nous desendons vers le village, nous longeons l'Argens sur deux kilomètres puis nous traversons la route pour entrer dans le vallon des Baumes. Le sentier sinue avec l'Argens. Il est bordé de roches immenses taillées en caves trogoldytes par endroit. La végétation est dense. Des noyers, des chataigniers, des chênes, des arbrisseaux légers au ras du sol... C'est un véritable enchantement. Il fait si frais sous ces branches. C'est à la fois, rassurant, reposant et idyllique. Nous cheminons tranquillemement.
Un décor de bois vierge. Nous inventons des cris de singes, d'oiseaux multicolores et immenses... D'animaux de nulle part. Ah, qu'il est doux le cri de l 'hyppopotame au ras de l'Argens. Nous perdons la notion de lieu et de temps.
La montée est douce. Nous arrivons sur le plateau. Cailloux, roches et cailloux mais pas que... Au ras des rochers qui dominent ce plateau des vignobles tout neufs ont été plantés. Incongrus au milieu des rochers, en plein cagnard d'une fin de matinée. Immenses et perdus dans un univers de cailloux et si peu accessibles. Nous traversons ces vastes espaces. Nous trébbuchons souvent car le sentier est très pierreux mais au bout du vignoble, en quelques enjambées nous voilà à flanc de roche, descente panoramique.
Je me promets de dénicher un jour le vin de ces vignes. Promesse à tenir car le retour est scabreux. On croit que ça descend, puis ça remonte, et puis ça redescend et puis ça remonte... pentes en alternance. Je trouve ça un peu long. Il nous faut presque une heure pour amorcer notre vraie descente. Un peu difficile car ce sentier n'est pas tendre avec nos semelles. Trés étroit, envahi de ronces, caillasses et galets qui roulent... Nous descendons pendant une heure. Je vais très lentement car c'est un exercice périlleux pour ma cheville. (la descente était annoncée : longue mais douce....) C'est vrai la pente n'est pas raide, vraiment pas. Mais zut alors, que c'est long. Ça fait quatre fois que Laurent m'annonce via son GPS, on est en bas dans 15mn.... Tu parles, à vol d'oiseau oui !
Et puis nous arrivons sur la départementale qui longe l'Argens et débouchons émerveillés à l'écluse de Correns. Un barrage, de vastes espaces dans lesquels s'isolent des baigneurs quelque peu téméraires... Nous on s'isole pour notre pique nique. La baignade ? Vous nous en croyez capables ?
Ensuite nous reviendrons à Correns en fin d'après-midi par le sentier des vignes ; trois kilomètres qui nous sont familiers désormais.
Nous avons mis 4h pour aller de Correns aux plages de l'écluse... C'est une belle équipée pour ma cheville. Elle est raidasse à l'arrivée...
Doliprane ou pas doliprane ? Douche d'abord... J'ai longuement arrosé d'un jet tendre et froid ma cheville. Je l'ai carssée, rassurée et félicitée. Me voilà au top pour m'affaler avec un livre. Et puis ce soir, le resto est au village donc pas doliprane... Je promets pas de déambuler des heures pour les photos de nuit.
Beaucoup d'entre vous habitent pas loin.. Si vous ne connaissez pas cette vallée de la Sourn, allez-y, Et si vous connaissez, retournez-y. Les ballades sont multiples et de tous niveaux. Il y a de jolies plages tout au long de l'Argens. Il y des randos canoé-cayak sur toute la rivière. Il y a des sites d'escalade impressionnants... Il y a des villages paisibles, des habitants souriants et courtois, peu de monde mais que des gens bien.
Il y a des crues à pas se rouler par terre, mais des crus très prometteurs et sans danger.
Nous, on y retournera...Dans l'immédiat et dès demain, cap sur les Cévennes pour dix jours. Parenthèse totale de portable et d'Internet. Bizz du paradis.
JanouB
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