MOT-ROSE...

Contagion morale ! Oh là, là, que c’est dur, ces journées qui perdurent...

Encore un jour mélancolique à l’horizon ; distance obligée avec mes enfants, mes amis. Corvée ménage à assumer, avec ma mauvaise humeur en prime.

Linge à repasser empilée dans la corbeille...

Patinage pas du tout artistique au piano depuis des jours... Peut-être même que je régresserais si c’était possible.

Mal au genou, impossible de pédaler, donc pas de sortie vélo.

Manquerait plus que je manque de lecture, le drame absolu.

Confinée je suis, et mon horizon s’est encore rétréci. Rien de bon dans l’immédiat. Crotazut !

Que faire ? Je me recouche en attendant des jours meilleurs ? je me vautre pour ressasser dans mon fauteuil , ou je prends le parti de pourrir la journée de Laurent ? Intéressante cette option, ça me défoulerait !

- Ressaisis-toi, bouge ! Le mouvement, c’est la vie !

- Vraiment ?

- Si, si, si....

Prendre le temps d’écouter le merveilleux chant du merle noyé dans les fleurs de l’arbre de Judée. M’émerveiller de la couleur solaire des fleurs, des bouquets de pensées, des soucis aussi géants que lumineux. (merci DamDom) Communiquer de loin avec les enfants, la famille, les amis... (Merci Daniel, si présent au tél) ou répondre aux agréables contacts radio, (merci amis OM), progresser en graphie (merci Serge), en espagnol... (Merci Maria) Rester bien au chaud dans une maison confortable, mon plus beau livre de l’année sur les genoux (merci Alex)  ; Oui, bien sûr, mais vous comprenez pas. Ces joyeux moments sont fugitifs, dès que j’en sors, je replonge dans la mélancolie. Je suis prisonnière de ma paresse morale.

- Tiens donc, et faire ce que tu as envie de faire, sans contrainte, ni obligation... c’est pas ça le bonheur ?

- Bof, une journée de cafard, avec ou sans contrainte, c’est une journée noire. Sale bestiole !

Mais dans quel étage erré-je ? Étagère de complaisance... Ouille, ouille, ouille !

Un regard vers la fenêtre de ma chambre. Les vitres sont couvertes de poussière et de pollen jaune, les encadrements des fenêtres aussi... C’est sinistre. Une stratégie urgente s’impose...

Quelle raison ai-je de me réjouir aujourd’hui ?

Au delà du réel, changer mon regard. La fenêtre devient brillante, si pure, qu’on passerait à travers la vitre sans la voir. Les huisseries sont toute blanches comme neuves... Laurent passe avec un grand sourire. Je me vois frotter, lustrer, faire briller. Il y a la radio en fond sonore. Des musiciens qui m’apaisent. Autant joindre l’agréable à l’utile... Scotchée devant ma fenêtre crasseuse, voilà que je fredonne. Les choses prennent de la couleur et de la brillance. Vite au boulot et en chantant ! Ensuite, je serai libérée de mes entraves morales. Ma journée sera sauvée.

Le frigo est vide. Faire les courses, la queue dans les magasins, frôler des virus à la pelle... s'étouffer sous le masque, les lunettes aveuglées par la buée... Éviter les rencontres. C’est une vie ça ?

Quelle raison ai-je de me réjouir aujourd’hui ?

Un pt’it tour dans la cuisine encombrée. Dégoutée, je secoue les casseroles et je fais valser les rares légumes flétris. Et si je décidais de mitonner quelque repas goûteux et original. Je sens déjà l’odeur riche des épices que je vais dénicher. J’aime le parfum fruité de l’huile d’olive. De savoureux repas complètement loufoques apparaissent dans ma tête. (du genre purée de patates douces au cacao, avec des côtes de veau bichette... promis j’essaierai.) Apparaît le sourire ravi de Laurent toujours sensible au divin plaisir de la table. De bien belles complicités pourraient se préparer si je me secouais. Je rigole dans ma tête. Je suis soudain impatiente de sortir. Flâner dans les rayons, humer, observer, comparer. Faire les courses devient un jeu de pistes.

Ma journée sera sauvée.

Ça fait des jours que je rame au piano. Je piétine sur quelques mesures, je crois bien que plus je m’obstine, plus je régresse. Ras le bol, j’suit trop vieille pour ça, j’suis trop nulle.

Quelle raison ai-je de me réjouir aujourd’hui.

D’abord apprivoiser la bête, ce beau piano d’un noir si chic. Oh là, là que je l’aime. Je caresse le bois brillant. Il offre à ma paume de délicieux arrondis, d’une incroyable douceur. Un piano ça se touche mais pas que le bois... Voilà, j’ai envie de l’entendre, j’ose à peine. Je frôle les touches. Désolée mon vieux, je fais ce que je peux pour nous deux. Je l’entends presque rigoler le piano.  Il n’y croit plus ? Non mais, on va voir, ce qu’on va entendre. Et ça va pas traîner. Un peu de muscu des doigts, (merci Dany) et c’est parti. Concentration intense mais pas oublier de respirrer (merci Annette). Oh là, là, que ça fait du bien de ne vivre que pour soi. Ma journée sera sauvée.

Le mistral me casse les oreilles, je n’aime pas le mistral. Il ne respecte rien. Le jardin non plus ne l’aime pas. Ça le met cul par dessus tête. Sortir dans ce monde dévasté, ça va pas non ?

Quelle raison ai-je de me réjouir aujourd’hui.

Et si je me forçais un peu ! Me voilà dehors, costume étanche aux rafales. Je fais le tour en prenant mon temps, pour réparer les dégâts, redresser le chaos provoqué par les coups de vent. Et puis j’irai le défier à travers les allées de la colline, ce foutu mistral. Na !

Et ce matin, le mistral qui n'en finit plus de rafaler.

J’ai décidé de penser à vous. Contaminés par la morosité ambiante peut-être ? Je voulais vous dire comment je cultive mon optimisme et partager cette aptitude. Et puis vous faire sourire aussi !

Et si on se mettait entrain... Petit train de plaisir ?  « C’est ça qu’y est bon dans la vie » (hein Jo!)

Et vous, quelle raison avez-vous de vous réjouir aujourd’hui ?