L'AMOUR EN CAGE....

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 Le mois de mars, m'a paru particulièrement pénible. Le ciel grisouillait... toujours  couvert, mistral noir, ou grosses brassées de stratus bas et prometteurs de pluie... Mais sans effet. Le jardin est minable, déshydraté. L'arrosage restreint de Laurent ne suffit pas à lui rendre ses couleurs.  Tous des menteurs ! Si, si, si, même les nuages parlent le langage politique !

Les coucounets aussi se sont mis en mode oubli... Il s'est passé quelque chose de terrible à mon insu. J'ai perdu le feu sacré qui m'anime depuis si longtemps.  je ne me berce plus des phrases chantantes de l'espagnol que j'aime tant entendre ou lire.J'ai perdu l'oreille et les caresses du piano. Je suis fatiguée rien que de le voir alors je l'évite, je ne le regarde même pas. Il prend la poussière, ça m'est égal.

Une toute petite lueur cependant. J'ai décidé en janvier de tourner un court métrage qui me tient à coeur. C'est un travail administratif quasi routinier, disons que ça m'occupe. Mais je n'ai plus d'enthousisme pour rien du tout.  Je regarde des séries débiles à la télé, en somnolant et la nuit,  je me réveille en sursaut, le front ou la joue douloureuse en appui sur la couverture d'un livre ouvert. C'est pas ce qu'il y a de plus moelleux comme oreiller. Mais qu'est ce que je lisais avant de m'endormir ?

Serait-ce mon grand âge 72 ans, qui me turlupine. je ne sais pas. J'ai pourtant traversé le temps sans le prendre en compte jusqu'à maintenant. Oui, je vieillis, et alors. Je croyais que je m'en moquais, parce que j'aime me sentir vivre et que c'est l'essentiel. 

C'est  la première fois que je ressens ça. Une sorte de bascule... vers le 3ème âge... Certains peuvent penser que ce n'est guère original et que bien des vieux traversent cet étonnant paysage, mais crotazut, je ne m'y attendais pas et je m'en relève à peine.

physalis

Mars guerrier est en déroute.  La météo est noire, mon moral vacillant. Patatras, ma santé excellente s'est mise en berne... Dans cet état d'esprit, j'ai dû me soumettre à toute une panoplie d'examens... auxquels je ne m'attendais absolument pas. Le mistral noir s'installe dans mon moral !

Voyez-vous, si je dois fréquenter le monde médical, je me sens automatiquement malade. La veille d'un examen, je dors mal, je transpire, j'ai des vertiges, et même c'est vous dire comme c'est idiot, j'en perds l'appétit. Perdre l'appétit, moi ? Ouille, ouille, ouille !

Mes proches le savent et ça les fait rigoler doucement, enfin, j'espère... Mais voilà que mon médecin traitant, fraîchement choisie comme telle, s'avise qu'à mon grand âge de mère grand, je n'avais jamais vu de cardiologue de ma vie...

- Mais comment donc, mais un bilan complet s'impose et vite.

Elle a l'air de prendre ça très au sérieux et Laurent me rassure, c'est juste une formalité préventive. 

- Ton hypertension mérite un peu d'approfondissement non... ?

- Bof !

 

Comme vous ne savez pas, il m'arrive de suivre les conseils qu'on me donne. Je prends donc rendez-vous avec le  cardiologue de Laurent qui paraît digne de confiance. Ça je confirme, il est digne de confiance. Il m'a prescrit pas moins de

- 6 scanners-echodoppler différents concernant ma circulation interne... 

- une anlyse de sang qui fait trois pages

- une analyse d'urine bien vaste aussi... 

- le port d'un enregistreur pendant 24h, des fois que j'aurais des rupture de rythmes cardiaques à mon insu ?

- un test d'effort. (franchement, j'ai fait aucun effort, j'y ai pas cru à ce test). La montée de la colline en vélo, même avec l'assistance électrique est autrement difficile.

 

Ainsi a défilé le mois de mars, d'un rendez-vous à l'autre, d'un retour d'info à l'autre via le cardiologue... J'ai l'impression d'avoir passé le mois de mars en milieu médical. Mon moral a pris un rude coup de sabot. Car ces rendez-vous pas galants bien que fort courtois, n'en finissaient pas et posaient un certains nombres de questions... décelaient d'étranges anomalies... Ça me minait.

 

Il y a deux jours, j'ai subi le dernier scanner de l'aorte,  (celui-là va-t-il en appeler d'autres ? Je sais qu'il y a un hic sur l'aorte, décelé ailleurs, mais de quel ordre ?) Je ne suis pas tranquille.

Résultat dans vingt-quatre heures, un bout d'éternité, trop long. Je demande timidement à l'opératrice si c'est possible de parler un instant au médecin.

- Oui, pas de problème. Il faut juste attendre quelques minutes qu'il prenne le temps de lire les radios.

Je m'assieds dans le couloir, casque audio sur les oreilles, ça m'empêche de penser. Une porte 'accès interdit ' s'ouvre.  Un homme d'une cinquantaine d'années, blond et magnifique, m'adresse un sourire lumineux. J'ai envie de m'y fondre.

- Vous êtes madame Becker ?

Quelle chance, c'est lui qui me reçoit, il ne peut me donner que des bonnes nouvelles. 

Je me lève, je vais vers lui, sans lui tendre la main, gestes sanitaires obligés, mais je lui dis quand même bonjour. Il me fait entrer. Il me regarde d'un air tellement inquiet que je panique. Il me montre une chaise.

- Asseyez-vous, vous allez tomber !

Il s'accroupit devant moi. 

- Ça va ?

- Oui, bien sûr, pourquoi ça n'irait pas. Y'a un truc louche dans le scanner ?

Il éclate franchement de rire et se remet debout.

- Non, pas du tout. Vous êtes en pleine forme. Bon d'accord, l'aorte initiale est un peu trop large mais rien de préoccupant. C'est très banal. Si ça se trouve vous êtes née comme ça.

Il marque une pause.

- Mais dites-moi, vous êtes toujours aussi stressée ?

- Oh non, ça m'arrive jamais !

Il s'offre le luxe d'éclater de rire. Je profite de ces excellentes dispositions.

- Donc je peux rentrer à la maison, et j'ai pas besoin de retourner voir le cardiologue ?

- Non, rien d'obligé. A l'occasion, donnez quand même les résultats à votre médecin traitant.

- Faut que je fasse un contrôle tous les ans pour voir si ça s'aggrave cette largeur "initiale" ?

- Non, vous pouvez dormir tranquille.

- Youpi !

Ça c'est un homme comme je les aime... Dommage que ce soit dans le monde médical que je le rencontre, j'en aurais bien fait un pote.

 

Donc, mes journées vont se déplomber.  Question circulation interne,  y'a pas d'embouteillages aux carrefours, pas de bouchons prévisibles,  et les virages se prennent en douceur, sauf que je suis toujours en excès de vitesse... Mais ça ! Tant que ça circule !

La nuit s'annonce paisible et je m'endors en planifiant notre toute prochaine escapade en camping-car... Oh que j'aime la vie. Et je me réveille au milieu de la nuit mais vraiment pas bien du tout.  Mal de gorge, suées, toux.... sensation de malaise, Crotazut !

Laurent a été patraque toute la semaine. M'aurait-il filé sa crève ? Je passe la journée à sucer des pastilles apaisantes et cure de doliprane...

Je passe plusieurs fois au bord du piano, le caresse contrite.

- Pauvre vieil ami, je t'ai bien laissé tomber hein ?

Je m'assieds sur la chaise, je sors quelques exercices de gamme, histoire de me refaire la main. Je reprends l'un ou l'autre air fastoche, qui me fait plaisir. Alors en plein enthousiasme, je cherche fébrilement dans mon fatras de partoches oubliées, la dernière partition qu'Olivier m'a transmise. Merci Olivier. Je déchiffre, je cale mes doigtés, je décrypte le rythme (qui me paraît compliqué, moi qui croyais entendre une valse toute bête...) Ce n'est plus du plaisir, c'est du pur bonheur. 

 

Nouvelle nuit, beaucoup plus paisible. Sauf qu'en me réveillant ce matin, ça n'allait pas fort. Fatigue, tremblement, et ce foutu mal de gorge qui s'aggrave.

Donc je suspecte une intrusion Covid, que l'analyse en pharmacie confirme en fin de  matinée.

Voilà, j'en suis là. Avec le moral tout neuf d'une petite vieille de septante ans passés. 

Laissons passer le mauvais temps ! 

et ceux d'entre vous que j'ai croisés... veillez à votre santé...!

Je vais faire un journal de bord de chaque jour, histoire de savoir comment se passe cet épisode de virus migratoire.

 

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