SÉNÉGAL -2009

st louisQuatre semaines entre Dakar,    Popenguine et Saint Louis

 

Dakar - Popenguine

 

 

15 décembre 2009 - Dakar
 Nous avons réussi notre arrivée à Dakar et dans de bonnes conditions, voire excellentes, malgré mon état de santé plutôt déficient. Toux persistante, épuisante, état fébrile. Une radio d'urgence 24h avant notre départ met en évidence une pneumopathie. C'était bien le moment. J'ai donc embarqué mes bagages avec les piqures, les seringues, la poudre blanche. Tout est passé comme une lettre à la poste en douane. Malgré mon extrême fatigue, je me sens vraiment euphorique. Et puis, je prends ainsi spontanément le rythme lent qui s'impose sous le ciel, tout en  couleur locale, ça me va.
Allez une image saisissante de mon arrivée. Nous débarquons un peu sonnés de quelques heures de vol et d'une plombe d'attente à la bagagerie... D'un coup, nous voilà seuls au monde noyés dans une foultitude de couleurs et de mouvements...  Vite de l'air ! Ouf.

taxis jaunesUne horde de taxis jaunes et noirs s'impatiente le long du trottoir. On se dégage de la cohue qu'on laisse à babord, coup d'oeil à l'arrière, c'est tout bon. Laurent suit en tractant sa charrette...
Une immense place cadrée de barricades basses. Au milieu trois gros fourgons sanitaires isolés et incongrus. Et tout autour des centaines de familles agglutinées qui piétinent, s'interpellent en scrutant les portes de sortie de l'aéroport. Comment peut-on rassembler autant de personnes en attende de leurs immigrés ? Je passe en mode totale réception. Une grosse bouffée d'air estival. J'aime bien ce sentiment de plus savoir où je suis.  Il faisait 25° à l'arrivée vers 10h du soir.


Hier découverte à pieds de Dakar... en même temps, monter dans un de ces magnifiques bus, ça nous démange.bus

On va, on zone, on s'imprègne. Si ce pays n'est pas neuf, il est parfaitement nouveau et ce pays nous plaît.

 

Popenguine, 19 décembre 2009
 C'est avec enthousiasme que nous quittons dimanche après-midi la bousculade de Dakar. Déambuler à travers la ville relève du défi et notre position de toubab (porte monnaie sur deux jambes) n'est guère confortable. salut

 

 

 

 

"On est vraiment casse-couille Madame, mais on n'est pas méchant !" nous a déclaré un sympathique Dakarois.

Popenguine est un village formidable et la maison que nous louons est exactement ce qu'il nous fallait malgré son total dénuement. 
Nous ne sommes pas surpris que la radio ne fonctionne pas, que les canisses sur la terrasse soient en ruine, que le portillon soit démantibulé, les volets déglingués par l'hivernage, que les dalles d'accès à la maison branlent allègrement, que les ampoules pètent quand on appuie sur l'interrupteur. Le pince fesse ici se joue dans les toilettes. Ainsi en va-t-il de la vie africaine ! Les coupures d'électricité sont quotidiennes et de préférence entre 19h et 23h. Dîner aux chandelles chaque soir, j'en connais de plus malheureux. C'est en général au moment délicat où tu retournes ton poisson dans l'huile chaude ou que tu veux te savonner sous la douche que la lumière s'éteint. J'adore !
maisonLe moment béni est celui du petit déjeuner. Le soleil est encore dans les nuages et la température est très douce (25°) avec en prime l'air frais de la mer. Vue imprenable sur les pirogues qui partent en pêche. Ici le poisson est l'aliment de base et on en mange tous les jours. 

Par l'arrière de la maison nous passons notre portillon un bel escalier privatif nous descend directement sur la plage.

cap naze De gros rochers cassent les vagues et lorsque la marée monte l'écume lèche les marches des escaliers. Nous sommes bercés en permanence par la rumeur sourde de la mer. Il m'arrive encore de me réveiller la nuit fort surprise que le lit ne bouge pas car je ne sais plus quelquefois si je suis en mer ou à terre. C'est un total apaisement et les nuits sont magnifiques.
Nous avons fait plusieurs visites au campement de Keur Kupan. Lundi matin nous allons revoir Oulimata pour envisager l'avenir. Ici les choses se mettent en place doucement et les décisions se prennent avec un flou très artistique. Entrer en action est une autre affaire. Ce n'est pas encore à l'ordre du jour.
Nous avons visité la réserve naturelle, en soirée au moment du coucher du soleil, petit coin de paradis à Popenguine.

Des nuées d'oiseaux noirs et bleus, jaunes et verts, rouges et verts, des gros becs noirs, des larges becs rouges, des plumages argentés. Ils peuvent être comme nos hérons ou échasses, mais ils sont aussi très exotiques avec des noms de rêve, roullier d'abyssinie, Kaloa bec rouge, merle bleu, merle argenté... et un dont j'ai oublié le nom qui fait semblant d'être un cygne.

koalaMerle d'Abyssinie et Koala bec rouge

Nous rencontrons tout plein de monde et je prendrai le temps de vous en parler, un peu plus tard car c'est un enrichissement qu'il faut réfléchir et qui me remet en question.
Hier soir, une belle entrée d'air maritime a porté des nuées de papillons blancs sur la terrasse. Il en arrivait de partout par gros paquets. C'est bientôt Noël et à Popenguine il neige des papillons. 
 
 
 

 


       

 

Immersion à Popenguine

Popenguine, 24 décembre 2009,

Au moment où j'inscris la date, je réalise que c'est Noel pour vous tous. Je vous imagine dans vos boutiques, dans vos préparatifs de soirée festive, oh les pôvres, à vous cailler les miches sur les trottoirs encombrés. En même temps je suis au clavier, la chaleur est déjà de 30° et la mer gronde contre les rochers. Quel sentiment étrange que ce partage de sensations entre ici et là-bas.
Donc ici, les gens nous ont repérés.  Les enfants ne nous interpellent plus, "bonjour Toubab !" Nous sommes en nette progression. Ils nous appellent par nos prénoms.

gaminAh l'incomparable réconfort d'être reconnus !

randoNous avons fait une rando jusqu'à la lagune de la Somone. Nous avons choisi de traverser la réserve naturelle plûtot que par les rochers. Laurent souffre toujours de son genou et le crapahutage nous a paru formellement déconseillé. Deux heures de belles enjambées à travers la brousse c'était déjà un gros effort. Au sortir de la réserve on entre dans le village de Guéréo par le nord. Une dizaines de femme s'activent en plein soleil. Elles ont étalé à travers un vaste espace de rochers leur séchage de poisson. Les enfants sortent de l'école et nous interpellent joyeusement. Nous voilà régressés au rang de "toubabs". Le village est superbe, de belles petites échopes, des maisons proprement alignées. Une vie tranquille et laborieuse. Notre arrivée y apporte de l'exotisme.

Au bout du village nous trouvons une charrette qui va nous conduire à la Somone à travers les palétuviers. paletuviers

Repas de lotte grillée et patates douces à l'abri d'une paillotte sur la plage.
Laurent et Brigitte qui ont adopté la Gazelle (bière locale plutôt douce) en guise d'apéro ont les jambes un peu molles au retour. Et puis le début de l'après-midi, ça cogne sec depuis le ciel. La brise d'Est qui souffle presque en permanence est un vent de terre. La sensation de frais n'est qu'illusoire. Il faut attendre la fin de l'après-midi et la renverse d'air maritime pour avoir un peu de frais au moins 5 minutes, juste le temps de prendre froid. Mais où sont nos petites laines ?
On évite en général de s'allonger sur le lit pour se détendre au moment le plus chaud de la journée. C'est étouffant.  les draps et les matelas sont affreusement chauds. On en pique ici des suées, j'espère que c'est salutaire.
Nous sommes invités à droite et à gauche, pour un repas pour un thé local... Nous rendons la politesse. Du coup notre vie sociale s'enrichit en permanence.
Deux personnes partagent notre profonde sympathie. Sidi, le jeune Mauritanien bijoutier qui n'hésite pas à faire 20km à pied s'il sait qu'un charter de toubabs est annoncé dans les villages voisins. sidi

Et puis, l'incontournable Hubert, notre futur tailleur... Je suis en affaire avec eux, mais nous n'avons encore rien défini de précis... J'aime cette promesse de négociations qui prend le temps de se réaliser et de parler d'autre chose. hubert

 

 

 

Nous sommes allés à Thiès avec Birane, il nous a pilotés toute la matinée à travers l'immense marché. J'ai fait provision de légumes et de fruits. J'ai aussi acheté du beurre de karité pour Alex et Karine... Les garçons entraînez vous à l'art du massage tout en délicatesse. Vous aurez bientôt besoin de maîtriser cette technique pour vos dames.
Sur le marché, c'était curieux les négociations entre le vendeur, Birane et nous, toubabs qui payons le tarif toubab, bien entendu. Je précise à chaque fois que je suis toubab français, pas toubab américain, faut pas exagérer non plus. Les vendeurs trouvent ça très comiques...thies1
thies2

 

 

 

 

Avec Oulimata et le campement des femmes nous avons réfléchi. Nous avons aussi rencontré le Principal du Collège. Nous avons beaucoup discuté avec Birane et sa femme. (ils viennent manger à la maison la semaine prochaine). Nous sommes Laurent et moi très dubitatifs quant aux grandes idées sur la manière de venir en aide à ces hommes et à ces femmes qui vivent de si peu. Telles que nous voyons les choses depuis notre opulente Europe, nous sommes vraiment à côté de la plaque. Dans l'immédiat après concertation avec les actifs du village, nous avons réorienté notre projet de partage avec le  village.

rue pop
Nous avons passé une matinée sur le travail des "pare feux"avec les jeunes du collèges. Débroussaillages des herbes sèches tout le long de la clôture qui protège la réserve. Nous avons des rendez-vous pris avec les adultes bénévoles de la Réserve et dans les villages voisins. Je vous en reparlerai plus tard.
Depuis quatre jours, (c'est aujourd'hui le dernier) Nous essayons Laurent et moi de comprendre le phénomène "n'deup". C'est un évènement rare, il concerne une femme du village "malade dans sa tête". Elle est en quelque sorte habitée par un esprit malfaisant qui la détruit. La communauté a décidé de la soigner collectivement. On fait venir un groupe de musiciens (sept tam-tams de formes et gabarits différents) on fait venir une guérisseuse qui prend les choses en mains. Une partie des cérémonies se passent dans la maison de la malade. C'est un  rituel compliqué. On sacrifie une chèvre, des poulets blancs. On prépare de la nourriture pour les offrandes, lait caillé, fruit de Kola, et puis de l'eau "sacrée".
Il y a trois cérémonies par jour, une vers 11h le matin, une vers 17h le soir et une la nuit.

soir merLes femmes et les enfants se rassemblent en cercle devant la maison de la femme "possédée". La plupart apporte chaise ou tabouret. Le guide de cérémonie matérialise un petit espace au milieu de ce cercle d'environ trois cents personnes. Il y verse de l'eau sacré, du lait caillé et un espèce de cône planté dans la terre. Les musiciens s'échauffe mollement. Ca démarre un peu dans la confusion. Les femmes installent leurs petits confortablement contre elles, les plus jeunes s'installent par terre, on échange les derniers potins. Une bonne heure pendant laquelle on prépare la malade dans sa maison. Puis d'un coup les tams-tams s'harmonisent, les sons giclent avec violence et le rythme s'accélère. Une femme puis deux, puis trois se lancent sur la piste. Elles se déplacent en tournant autour du cercle sacré, leurs pieds battent le sable, la danse devient frénétique. D'un coup l'une envoie sa tête dans tous les sens, ses yeux se révulsent. elle jette ses bras vers l'avant, vers l'arrière, vers le sol. Plus vite, toujours plus vite. Plus fort, toujours plus fort. Elle court en titubant à travers la piste. Elle s'affale. Tout son corps est agité de spasmes. On l'asperge d'eau sacré, on l'aide à se relever, elle repart sur la piste, plus violente encore. Visage vers le ciel, elle hurle des sons étranges. Le public rigole, elle doit dire des obsénités. Elle lève ses jupes, elle balance ses cuisses dans tous les sens. Elle est effrayante. Des 'meneuses" (je ne sais pas comment les appeler" gardent le contrôle de la situation. Elles arrosent les femmes qui dansent, elles les arrêtent si elles se jettent sur le public, elles rafistolent leurs tissus qui glissent et se dénouent. Un des musiciens  harcèle l'une au l'autre avec un tam-tam au son très métallique... Elle se retourne vers lui et tout en gesticulant se rapproche et s'affale dans ses bras. Deux ou trois femmes essaient ainsi d'entrer en transe avec la malade. Pendant tout le temps de la danse, elles sont aspergées d'eau sacrée. La nourriture passe entre les chaises ainsi que la calebasse de lait caillé.  Les tams-tams assourdissants sont soutenus par les mélopées des femmes qui facilitent par leurs incantations l'entrée en transe. C'est une démonstration magistrale de la puissance collective. C'est un vrai travail sur le mental. Nous n'avons pas compris tout le rituel, mais à un moment, la musique s'est arrêtée. En en quelques secondes la place s'est vidée. De toute évidence, personne ne souhaite s'attarder sur les lieux du rituel. Les visages familiers nous ont salué rapidement et se sont échappés. Nous nous sommes retrouvés tout seuls sur la place les oreilles vibrantes, à plus trop savoir quel était ce silence étouffant ni à quel monde nous avions échappé.

Germaine ton pays est magnifique,

Merci à toi et à Pierre de nous y avoir initiés.
bonne annee

 

Autour de Popenguine

Premier janvier 2010, c'est l'heure de la sieste pour les uns, l'heure courrier pour d'autres, pour moi l'heure de revivre en images quelques moments de notre bonne et belle vie autour de Popenguine.
D'abord une belle virée en vélo (loué gentiment à Birane, 2 euros par jour, deux vtt flambant neufs, version sénégalo-chinoise, option homme, option dame, plus de vitesses que je ne saurais en compter...) La route goudronnée qui sort de Popenguine, puis une piste qui longe la mer.La piste tantôt parfaitement damée, tantôt de sable fin que le vent a dispersé en vaguelettes très casse-binette... Et raide au pédalage.  Une dizaine de kilomètres de suées fort sympathiques, (même sous le chapeau peul destiné à Olivier, un peu usagé mais authentique...chapeau L'homme qui me l'a vendu assis au bord de la piste, le portait sur la tête. Dures négociations dans un langage approximatif. Je le quitte fort joyeuse, la tête un peu lourde, mais enchantée par ma négociation. A voir le large sourire du berger, aucun doute je me suis fait avoir. Et ça me comble de joie !
La brousse est un vaste espace d'herbes sèches très hautes, d'acacias et de baobabs centenaires. Bientôt les baobabs auront perdu leurs feuilles de lourds fruits oblongs qui pendent  tomberont au sol. Une fois bouclé ce cycle, ils seront prêts pour subir la saison sèche sans dommage.  baobab
Lorsqu'une voiture nous double ou nous croise on traverse un écran de poussière, ne restons pas sous son vent ! Les ânes très élégants avec leur encolure marquée d'une belle ligne sombre, broutent dans la poussière. Nous croisons des carrioles,  des chars à bancs,  tirés par des chevaux,qui ont la taille des ânes. On slalom d'un bord à l'autre de la piste en fonction du relief du sable et les charrettes aussi... Où croiser un véhicule est la question jusqu'au moment où on frôle la charrette. De grands saluts, que de la joyeuseté sur la route.   
Cependant, à l'entrée du village le comité d'accueil me préoccupe : un gros troupeau de zébus blancs qui occupent toute la piste. De loin, ils ont l'air placide... De près je les trouve trop gros... J'en mène guère large et je descends du vélo avant de traverser le groupe. zebus2Pourvu qu'y en ai pas un, en manque d'affectif et qui voudrait m'enlacer avec ses jolies cornes si largement arrondies vers l'avant.

zebus1 Au bout du troupeau alors que je remonte sur le vélo vraiment soulagée, c'était pas si terrible finalement, un coup de guidon intempestif me permet d'échapper au gardien qui fait des moulinets en l'air avec son coupe-coupe. Échapper aux vaches africaines et se faire pourfendre par un Sénégalais maladroit... ou rigolard !
Autre jour, Une virée avec Wulimata à la rencontre des villages de brousse. Qu'il y ait une éolienne pour tirer l'eau au robinet du puits ou que les femmes montent les seaux à la force des bras... C'est d'abord et avant tout du labeur joyeux et plein de couleurs. A proximité du puits un homme étrille son cheval. Qui ne se soucie que du seau dans lequel plongent ses naseaux. A notre approche il relève sa gueule ruisselante, le poil d'un beau brun soyeux... Encore un qui trouve la vie bien belle en cet instant.
L'un des hommes nous explique que l'éolienne c'est pas le Pérou, car s'il n'y a pas de vent, il faut aller chercher l'eau à pieds au village voisin.
Chez les voisins, ils ronchonnent contre l'éolienne qui les nargue, parce que ceux là quand y'a panne de vent, ils viennent prendre leur eau... Du coup, il peut arriver qu'il n'y ait d'eau pour personne car le puits n'est pas en réserve pour deux villages.  Hé oui, à chacun ses parasites. Ici ce n'est pas le pain que l'étranger te prend dans la bouche, c'est l'eau ! Mais eux je les comprends, ils ne vivent pas dans l'opulence !
A la sortie du village sous les baobabs, d'énormes tas de mil ou de sorghos. Laurent s'essaie au battage comme un vrai de la brousse. Aïe mon dos ! C'est plus de son âge. Il est vrai que ce sont de jeunes hommes qui se relaient pour ce travail fastidieux et épuisant. Le long bâton épais qui sert de battoir n'est pas un outil de rêve.  Plus loin, des femmes debout devant un  mortier en bois pilent les graines pour les décortiquer. Elles se relaient au pilon. Dans un autre groupe elles sont assises en rond au sol, leurs bébés collés dans le dos. Elles vannent  avec une grosse calebasse évidée.Des poussières de son volent comme de minuscules mouches et les enrobent de nuages gris.
Il est pas loin de midi, la chaleur est étouffante et ça bosse tranquillement mais sans répit sous la protection des baobabs.
Nous rencontrons des gens souriants, aimables qui ouvrent leurs portes. Nous reviendrons les voir la semaine prochaine, après les fêtes.

mar 1Notre vie sociales prend une belle envolée. Nous voilà invités à un mariage Serère. Je n'ai pas tout compris du rituel d "intronisation" de la mariée avec les femmes, ça prend un temps incroyable, ça mériterait un coucounet pour lui tout seul ce mariage.
mar 2

 

 

 

Ensuite, un peu de tourisme dans l'île magnifique si bien préservée de Fadiouth, l'île aux coquillages. Le tourisme y est magistralement contrôlée.Visite guidée obligatoire. C'est la version africaine de Riquewhir ou les Baux de Provence. C'est magnifique. Une sorte de musée en plein air,  greniers à mil des temps anciens qu'un conservateur entretien et protège sous l'oeil placide des oiseaux de la mangrove.
Nous sommes entrés en début de soirée en pirogue, soleil couchant sur la mangrove. 1 joal

Dans le village harcèlement commercial inévitable. Nous avons perdu Laurent pendant une bonne dizaine de minutes. Il finit par nous rejoindre vraiment très content de lui. Il a troqué un magnifique (?) masque en bois  et se pointe en traîne savates des tongs infâmes, couleur verte, aux pieds... Super Laurent se met au rythme local.
- C'est quoi cette horreur, t'es fou d'avoir acheté ça ?
- Je l'ai troqué
- Troqué ?
- Oui, j'ai filé mes chaussures contre l'objet d'art (?) et les tongs du vendeur. Je voulais pas acheter et mes chaussures lui plaisait tellement... Il les lui fallait absolument pour le 31 décembre. Il était certain qu'elles allaient lui assurer un énorme succès pour la soirée. Y'a pas d'mal à faire plaisir !
En voilà un beau souvenir de vacances ! Avec le lourd chapeau paysan, nos bagages vont s'alourdir considérablement.
Pourvu que  Laurent ne troque pas sa flûte contre un balafon !grenier

Soirée cinéma à Popenguine

Salut les Hivernois,bus

Allez,  zou, encore un excellent moment de vie à Popenguine pour vous réchauffer les zygomatiques et c'est au cinéma au coeur du village, sous l'arbre à  palabres que ça se passe. 
Hé oui, séance fin d'après-midi pour les petits avec "le livre de la jungle" ; séance en soirée pour les grands avec "tableau ferraille".

Dans l'après-midi, le réalisateur  Moussa SENE (né dans la banlieue de Dakar en 1958) et son équipe très professionnelle, bien rodée aux techniques locales, (ils sont deux technos)  ont installé un immense écran de tissu blanc tendu entre deux poteaux, au fond de la place du marché juste sous la pharmacie. Des bancs, des chaises ont été alignés en demi-cercle par un peu tout le monde. Ici on va au cinéma avec son tabouret sous le bras, une chaise pliante, voire un fauteuil et des coussins... Il faut savoir que la projection est gratuite ce qui autorise à chacun de placer le luxe de sa place comme il le souhaite. Moi, j'ai prévu de m'asseoir par terre pour être bien devant.... L'agitation est fort sympathique, vivement ce soir.

 popo

21h, nous guettons depuis la terrasse les bruits ambiants guère différents du quotidien, ânes, cris d'enfants, rares voitures, cloches du couvent...  Nous décidons d'aller faire un tour (une centaine de mètres) jusque sur la place. Silence totale, chaises vides, pas âme qui vive, ni chat, ni chien, pas l'ombre d'une chèvre. L'écran est tout blanc, tout propre, stérile. Il ne se passe absolument rien ici.  Peut-être que ce n'est pas la bonne heure, pas le bon jour. Retour à la maison. Nous gardons l'oreille aux aguets.

22h, nous croyons percevoir une sorte de rumeur, des grondements, des piaillements. Mais les vagues sur les rochers nous perturbent, nous doutons. Retour sur la place. En quelques enjambées impatientes nous déboulons sur une place noire de monde. Des enfants pour un bon tiers du public... Tous les sièges sont occupés, bien des gens debout. Nous nous approchons. Moussa est devant l'écran blanc, face au public. Il parle en wolof. On distingue à peine ce qu'il dit, d'ailleurs je n'ai pas tout de suite saisi qu'il ne parlait pas en français. Le bruit ambiant est énorme. Ça discute, ça crie, ça se bouscule, ça gesticule et ça s'interpelle. Quelqu'un nous fait signe d'avancer. Les enfants assis sur la dernière rangée de chaises sont vivement expédiés ailleurs. 

- Allez ouste, c'est pas pour vous, la séance du soir, laissez la place aux grands (ça me fait plaisir d'être traitée de "grande")
Les gamins se faufilent entre les chaises, prestement casés au mieux. L'orateur commence à manifester de l'agacement. Il fait de grands gestes, de grands pas face au public, il essaie d'interpeller, de retenir l'attention.
... Bon, puisque personne n'écoute je continue en français.."
Super qu'on se dit Laurent et moi. On va savoir de quoi il cause. Mais vu le bruit ambiant et les sonorités particulières du sénégalo-français, on capte rien du tout à son discours.  Il semble que l'ensemble du public se désintéresse aussi de ce monologue.
Mousssa lève les bras vers le ciel, "Et M... j'abandonne, envoyez le film !"
Le public se calme un peu, puis tout à fait. C'est presque incongru ce soudain silence, à peine le temps qu'on s'étonne. Des murmures reprennent, à droite, à gauche, un peu partout. Puis un éclat de rire, un autre, quelques autres... Mais bon, on peut suivre l'intrigue et très vite les images nous captivent. Enfin quand y'a pas de voiture qui passe. La route est juste derrière l'écran alors il arrive que des phares éblouissent  et on ne voit plus rien du tout pendant quelques instants. Mais c'est hors écran que nous sommes le plus fascinés. Il y a maintenant des scènes un peu crues... On ne comprend toujours pas les dialogues en wolof vaguement sous-titrés en français très approximatif. Mais la gestuelle des acteurs, les mouvements, les expressions sont très explicites. Un mot, un geste, les gamins hurlent de rire, ils crient, ils se tapent sur les cuisses. Les hommes engueulent une actrice qui paraît être une vraie putasse.... elle malmène un brave ministre intègre... si si si ça existe au Sénégal, au cinéma. Les femmes poussent des petits cris et chuchotent.chèvre Le long de la route, les moutons poussent des bêlements réguliers, les chèvres donnent la réplique... qui ponctuent efficacement les dialogues. L'action se complique, les relations entre l'homme et ses deux femmes sont tendues. .. trois ânes passent derrière l'écran, leur silhouette est fantastique. L'un d'eux un peu plus curieux passe la tête sous le drap, pardon sous l'écran. Hilarité et adhésion totale du public. 

aneLe bestiau nous brait un bon coup dans les yeux... Les deux potes de l'âne font le tour et passent devant l'écran. C'est du cinéma 3D mais La compréhension des images se compliquent. Un gamin assis par terre rampe un peu trop vite pour les chasser. Il s'emmêle les pieds, les mains, la tête dans les connexions du lecteur vidéo. ... Ecran noir. Mais où est la télécommande ? Moussa revient devant le public hilare.
"J'ai oublié la télécommande chez moi. Nous allons résoudre facilement cet incident. "
Il tergiverse avec les techniciens. On attend, on papote, on s'informe, on rigole. On en profite pour connaître les derniers potins. Quelqu'un fait passer des biscuits, des dattes. C'est l'entracte en quelque sorte. On est vraiment bien là au chaud sous le manguier. 
Nouvelle intervention de Moussa "nous allons chercher la télécommande à la maison, on ne peut pas faire sans. Attendez nous quelques minutes, ce ne sera pas long". Puis il s'éloigne vers sa voiture avec les techniciens.
Alors, les spectateurs qui n'ont vraisemblablement pas tout compris quittent progressivement leur place. L'espace se vide dans la bonne humeur et comme chacun sait, la bonne humeur c'est contagieux. Donc l'espace se vide. Vraiment c'était un excellent film, nous aimerions voir la fin . Nous attendons stoïques.  Lorsque Moussa revient après plus d'une demi-heure, (nous sommes trois sur les bancs) et il annule la séance. 

Le soir suivant, "Madame Charrette" nouvelle projection, toujours avec Moussa qui est héroïque dans son genre. Au 1er tiers du film, coupure de courant, je m'étonnais aussi que ça ne soit pas arrivé la veille. 


Quand Popenguine fait son cinéma, c'est dans la joie et l'insouciance. Le réalisme illumine la fiction, les acteurs hors écran sont époustouflants de naturels et les images 3D ne sont pas virtuelles. Quant au spectateur, il ne sait absolument pas ce qui l'attend. C'est du cinéma à haut risque. 

village plPour les jours prochains de nouvelles rencontres sont prévues dans les villages de brousse et une grosse journée avec les pêcheures de Guéréo. Et puis toujours notre intense vie sociale associée à de rares moments touristiques. Toutefois nous avons prévu une escale d'une journée à Saint Louis avec Birane et Diarhère. st louis
Le temps se rafraîchit et les moustiques se planquent. 30/32 ° dans la journée et autour de 20 °le soir. 
Les codes de fonctionnement, le rythme du quotidien, tout ce qui manque de superflu, tout ce qu'on gagne d'essentiel.... nous apprenons une autre vie et nous aimons cette vie là. Notre retour est imminent. Ce sera étrange l'opulence dans la petite maison de Velaux.... JanouB