Vendredi 10 juillet 2009 -Bassin Bérouard- la Ciotat
4ème jour de tourisme à la Ciotat. Nous sommes amarrés en avant et c'est pas terrible car le quai est particulièrement bas. Assez facile pour descendre, après un grand écart, il suffit de se laisser tomber par terre, mais pour monter c'est nettement plus acrobatique, voire quelque peu hasardeux. Tensions, extensions, poussées, tirages, élongations. Nos vieilles douleurs se réveillent. Passons sur ces désagréments secondaires.
Au coeur de la ville, découverte d'un marché fort agréable mardi matin. Flânerie sur les quais du Vieux port qui se transforme en foire artisanale et touristique en soirée. Babioles et trouvailles en tous genres, parfaitement inutiles pour la plupart donc indispensables aux vacanciers. Laurent a falli acheter une toile peinte à la bombe... Ouf, après réflexion, y'a pas de place sur nos murs. La maison de Velaux l'a échappé belle.
Nous avons visité le musée des Frères Lumières. Retour aux origines du cinéma qui était en ce temps là de l'ordre de la science plus que de l'art cinématographique. Nous avons été captivés tous les deux avec un rien de nostalgie aussi. La chapelle des Pénitents Bleus propose une expo peinture sur le thème de la " musique " un vrai régal. L'ambiance à la Ciotat est très festive et très agréable. C'est une ville sage en même temps. Ambiance très familiale. J'aime bien. A bord le vent hurle dans les haubans, ça cliquette et ça grince dans tout le voisinage. Nous sommes contents d'échapper aux aléas du mouillage avec des pointes de vent qui s'affichent à plus de 35 noeuds. On se lève le matin avec 15° dans le carré, les petites laines sortent des placards. Nous profitons de notre désoeuvrement pour travailler sur le court métrage de " Mon Village ". Le deuxième jour, j'ai la sotte idée de vouloir prendre une douche chaude au port. Les sanitaires sont de vraies étuves et j'ai vraiment froid en remontant à bord. Pas de pot. Après ce coup de chaud et froid, j'éternue cent fois et dans la nuit je couve une bonne fièvre sous la couette. Saint Paracétamol intercédez pour moi.
Samedi 11 juillet 2009. Accalmie météo. La queue de mistral résiduelle annoncée force 3 ...4 nous séduit. Filons vers l'Est. Dans la matinée, nous traversons la baie de la Ciotat, belle allure de largue, vitesse 5/6 noeuds. Je me love au soleil. Ma toux prend du recul. Au niveau de la Baie d'Alon juste avant Bandol, les creux sont plus profonds, pas loin de 1 mètre, le vent passe arrière. LDM est poussé sous les fesses. Il adore ça ce bateau farceur. On fait des bonds en avant. Pas forcément confortable mais on fuse sur l'écume. Du coup on ne s'arrêtera pas à Bandol. Joyeuses pensées Amis Bour ! Vous savez bien, en méditerranée, il faut toujours profiter de ces momnets bénis.
Nous avons bien fait de pas traîner, à 15h, notre vitesse tombe en dessous de 2 noeuds, le génois se ramollit... Moteur ! Au niveau du Cap de Carceirane, une accélération soudaine nous permet de renvoyer le génois seul. La mer est beaucoup plus calme ici, et notre balade devient fort agréable avec une vitesse constante de 5 noeuds 1/2. Pas de doutes le cap Cepet est une frontière météo très précise. Nous traversons la petite passe des îles d'Hyères lumineuses sous le soleil. Nous les laissons à tribord. Nous décidons d'aller nous abriter à l'Est de la pointe de l'Estérel, Presqu'île de Giens que nous savons agréable. C'est immense et nous posons notre ancre par 8 mètres de fonds avec 40 mètres de chaîne. Il y a quelques herbes superficielles mais l'ancre les traverse sans problème. Vu la longueur qu'on aligne, totale sécurité. C'est ça qui est chouette dans les vastes mouillages, on s'étale, on s'étale... Un voilier qui lui, ne s'est pas assez étalé dérape pendant que les propriétaires visitent la côte. On le voit partir sous une rafale force 6, et dériver lentement; ça vous rappelle quelque chose de nos aventures ? Laurent souffle à fond dans sa corne de brume pour prévenir les plus proches voisins. Concentrés sur leur pastis, ils ne voient rien venir. Finalement ils réagissent magistralement au moment où le fuyard va les percuter par l'arrière. Ils arrivent à le retenir. Ils le mettent à couple et attendent jusqu'à 21 heures que les chanceux propritaires récupèrent leur bien. (pas bileux pour deus sous, ils ont joyeusement festoyé à terre en prenant leur temps. Décidément ça me rappelle quelque chose !) Nous voilà pour de bon dans le monde de la plaisance et de ces petites surprises !
Dimanche 12 juillet 2009
Les vents sont annoncés de flux d'Est, La protection ici devient douteuse. Il va falloir déménager. La mer est à 17° les baigneurs sont rares et l'immense plage très clairsemée. Mais où sont donc cachés les estivants ? Nous décidons de traverser la passe et rejoindre Porquerolles juste en face de nous. Nous quittons le mouillage à 17h15, alors qu'un rideau de brume tombe sur la mer. Nous avons observé qu'il y a deux moments favorables pour s'installer dans un nouveau mouillage. C'est en matinée vers 10h, quand ceux du matin sont partis ou en instance de départ et que les suivants ne sont pas encore arrivés. Ou alors entre 19h et 20h, quand les locaux quittent tardivement les lieux pour rentrer au port. Ils sont légions à laisser d'immenses trous dans le mouillage après un dernier apéro à bord. Lorsque nous traversons la passe par vent arrière avec juste le génois, on croirait croiser un boulevard. Les embarcations de toutes les sortes et de toutes les tailles pétaradent ou fusent de tous les côtés. Des voiliers tirent des bords dans tous les sens. Ca ronfle, ça vrombit, ça chuchote.... Bruyant et agité. Nous ne risquons pas de nous endormir mais faut pas rêver non plus.
Lorsque nous sommes au milieu de la passe, la presqu'île de Gien et toute la baie de Hyères sont noyées dans le brouillard. Devant nous, des collines grises et des forêts de mats... Il semble qu'il y ait un monde fou à Porquerolles. A tel point que j'ai un doute, c'est des mas ou les troncs des arbres ?
- Dis Laurent, tu crois que c'est une bonne idée d'aller se fourvoyer par là?
- Mais oui, t'inquiète pas, on a besoin juste d'une petite place pour LDM.
Il a raison. Il doit bien y avoir une centaine de bateaux au mouillage mais cette baie d'Alicastre, à l'Est de Porquerolles est immense. Fonds de sable, nous mouillons dans un vaste espace par 6 mètres de fonds. Je dormirai tranquille.
Lorsque la nuit tombe, le vent aussi. Le mouillage devient étrangement calme. Les bandes de brumes se répandent tout le long de la côte.
A 22h, nous savourons cette nuit magnifique à l'abri du cockpit, enveloppés dans nos petites laines. Depuis que j'ai pris froid à La Ciotat, je n'arrive plus à me réchauffer. Oublions ça, la soirée est si belle. Le brouillard a absorbé nos voisins. Les feux de mouillage jettent leurs éclats dans la grisaille. Leurs reflets scintillent dans l'eau sombre comme de grosses étoiles tombées du ciel. Il pleut de la lumière dans le silence de la baie d'Alicastre. Nous sommes seuls au monde. Porquerolles est un lagon magnifique.
******************************************************************INTERMÈDE********************************************************************* - Allo, bonjour, je voudrais parler à La Noiraude.
- Ah, c'est toi, bonjour Grignot'age. Quoi de neuf ?
- C'est beau, c'est magnifique. C'est tout comme tu racontais. La mer, l'écume, le vent, la navigation. J'adore. Et j'ai même pas le mal de mer. - Alors tout va bien !
- Oui, enfin non, pas vraiment c'est pour ça que je t'appelle.
- T' es sorti de ta planque quand même ?
- Oui, bien sûr. Ils sont trop gentils à bord. Ils m'ont installé un abri dans le casier à casquettes. Un vrai nid de douceur. En plus je suis parfaitement calé. Super, vraiment ! Ils ont rigolé quand ils m'ont frôlé avec leurs pieds nus sous la table du petit déjeuner. Ils m'ont tout de suite adopté. Nous nous amusons, et nous baignons dans la tendresse, faute de profiter de l'eau de mer. A part la fraîcheur de l'air et de l'eau, c'est super.
- Alors où est le problème ?
- Le problème c'est que depuis que je suis là, il leur est arrivé quelques misères. Lui, il se déboîte le dos en permanence en plus il s'est brutalisé un orteil en courant à l'avant du bateau. Il marchait à peu près droit maitenant il boite. La femme tousse, tousse. Elle frissonne, elle a tout le temps froid. Tu crois que c'est de ma faute, que je leur porte la poisse ? Je n'ose plus les regarder, je culpabilise à mort.
- T'es vraiment cloche toi. Tu n'es pas responsable de tous les maux qui tombent sur les humains, qu'ils soient à bord ou à terre. Ils sont assez grrands pour faire leurs misères tout seuls. Probablement qu'à bord tu vas devenir leur mascotte. Quand un humain croise un truc à poils, à queue et à quatre pattes, il en fait toujours sa mascotte. j'ose dire que tu leur es indispensable.
- T'as peut-être raison car ils sont toujours aussi aimables avec moi. Pas un seul regard douteux, pas une seule allusion désobligeante. Ils ont renouvelé ma provision de carottes bio et avec les fanes, s'il vous plaît. Il me dispensent joyeusement leurs caresses. J'aurais jamais cru que ça me plairait d'être traité aux petits oignons. Tiens, j'ai bien fait de t'appeler. Tu m'as redonné confiance en moi. Merci !
- Pas de quoi. Celui qui n'a pas de doute n'a pas de conscience.
- Hélas, chère Noiraude et le poids des traditions pèse lourd sur la conscience !