Samedi 9 octobre 2021, aux aurores, donc pas tout à fait midi. Top départ, cap enfin défini… sud est, La Sainte Baume.
Nous quitterons les falaises rouges de la Sainte Victoire pour la vallée de l’Huveaune et sainte Zacharie. Jusque là pas de soucis, mais c’est sans compter sur les facéties du GPS. Il est spécial ce gps. Nous sommes certains de passer où qu’il nous guide. Nous ne risquons pas de tunnel inférieur à trois mètres. Nous ne risquons pas de faire écrouler un pont sous notre poids. Nous ne risquons pas de rester coincés dans un virage trop sec. Le seul risque, c’est son esprit d’aventurier. A partir de Sainte Zacharie, il nous embarque sur une route départementale à une voie de toute beauté, interdite au plus de 3T5. Les flans du petit camion décoiffent les herbes folâtres, bousculent les pétales des fleurs sauvages, frôlent presque les caillasses… Alllure escargot. Nous avons battu un record. Plus d’une heure trente pour 25 km. J’ai adoré ce parcours… Laurent certainement beaucoup moins.
Plan d’Aups parking immense, lieu dit : l’Hôtellerie… Fichtre, pour du parking, c’est du parking, des centaines de voitures sont alignées…Une concentration de véhicules sur des kilomètres. Découragés, on se réfugie dans le village, au bord des tennis vue imprenable sur la Sainte Baume.
Début de soirée, ambiance sympa autour du camion-pizza à une trentaine de mètres de nous. D’accord on n’avait pas prévu de la compagnie, mais ça va pas durer toute la nuit… Et puis c’est ça aussi l’esprit des vacances. Plus tard dans la soirée un martèlement de basses envahit l’espace sonore. On se décide à sortir du petit camion… Pas de pot, le « cercle » des jeunes est en pleine fièvre du samedi soir… A 22h on se doute que ça va se prolonger tardivement et c’est trop lourd pour nos oreilles. On retourne donc vers l’Hôtellerie. Bonne idée. Les parkings sont quasi déserts et nous offrent un choix de places inespéré. Nous nous cacherons le plus loin possible, en bordure de forêt. La route est juste là, mais y’a quasi personne qui circule la nuit. Ouf !
7 h le matin. Un autre ramdam nous sort de notre nuit. Des sortes de combis manoeuvrent à portée d’oreilles. Une horde d’humains semble se rassembler pas très loin. Très vite, ça rigole, ça chahute, ça piaille… Mais qu’est-ce qu’ils viennent faire là aussi tôt. Et puis des airs sont hurlés qui ressemblent à des chants religieux. Des centaines de voix, graves et aiguës, sans aucun souci d’ajustage. C’est phénoménal.
- Dis Laurent c’est quoi ce lieu ?
- Il paraît que c’est un lieu de pèlerinage, y’a une grotte un peu plus haut.
- Oh zut, C’est une secte qui s’échauffe pour son office du dimanche, si ça s’trouve.
- Attends, je jette un œil…
- Alors ?
- On dirait une corporation d’étudiants ou des scouts peut-être. Ils portent tous le même uniforme. Ils sont plus d’une centaine.
D’un coup, le silence nous tombe dessus.
- P'tit déj au calme, ils sont partis.
Hé non, une voix de baryton percutante entonne une chanson paillarde, que toute la clique (tête à claques) reprend à gorges déployées. Une horreur. Rapidement on entend que les hurlements s’estompent et que cette étonnante armée s’éloigne. Mais qu’est-ce qu’ils sont venus faire là ?
Histore de respirer un air plus vivifiant, et puis aussi parce que le Pic de Bertagne nous inspire. Faut qu'on repère les équipements du relais que nous avons si souvent cherché sur les ondes. Donc on change de campement. Nous trouvons un espace formidable pour nous garer à deux pas de la montée vers le sommet. D’un coup l’air nous paraît plus sain. Ho là, là, que c'est bon la forêt, les sentiers, les cailloux, et la solitude. Grolles et bâtons en avant, on se lance sur le plus sympa des sentiers. A quelques pas de là, on se heurte une fois de plus à une jeunesse exaltée, mais d'un autre gerne. Ici c'est l'heure ravitaillement du trail annuel de Cuges les Pins. Moyenne d’âge 40 ans, donc des gars et des filles, des hommes et des femmes, pleins d’ardeur. Une ambiance chaleureuse et vraiment sympa. Nous les laissons à leur ressourcement et nous attaquons la montée. Et ça c’est quelque chose.
Caillasses et rochers à escalader, sentiers instables, aucune sécurité, au bord de dégringolade de roches quelquefois. Nous ne tardons pas à tremper nos maillots… Nous avançons petitement avec grandes précautions. Les premiers « trails » nous foncent dessus. On se range pour les laisser passer. On fait quelques sauts de puce et un autre groupe s'annonce. Notre grimpée devient un jeu très rigolo car nous faisons de multiples pauses pour laisser passer des pelotons de coureurs, que notre ascension laborieuse gênerait ; Il flotte dans l'air un petit air de « diagonale du fou » qui nous plaît beaucoup. Ils sont tous très joyeux et très courtois. J’ai l’impression d’être une vache qui regarderait passer un train et lèverait le nez de son carré de cailloux à chaque wagon. Certains prennent le temps et nous taquinent alors j’en profite pour m’informer. Le trail fait deux circuits, 25 km ou 45 km, en tout plus de 1000 participants sont en course. Ce qui explique nos multiples stations.
- Au fait c’est quoi un trail ?
- Des grimpées, des descentes, les plus hasardeuses possible, et une tranche de saucisson, me répond l’un d’eux en rigolant, et croquant à belle dent sa rondelle en passant vite.
Il se fait dépasser par une magnifique jeune fille, toute en muscles et en finesse. Oh là, là qu’elle est belle.
Et ils foncent à travers rochers et caillasses, plus réjouis que jamais.
J’ai fait moissons de bonjours souriants et heureux pendant cette rando inattendue. J'ai engrangé toutes les sortes de saluts
Le bonjour pressé, à peine audible du mec hyper concentré sur lui-même, « bjour ! » ou plus laconique encore, « Mdame »… Et il passe. Il m’a pas vu. Lui, pas de doute, il fait la course.
Le bonjour courtois, « Bonjour, merci » mais toujours pressé, il me jette un regard rapide. Pas que ça à faire.
Le bonjour affable, « Bonne journée, merci Madame » il prend le temps de me voir. Ça peut aller jusqu’à un échange de regards. Il fait la course mais en dilettante.
Le bonjour qui est le dessus du panier, vous savez ce bonjour qui s’attarde sur vous, qui s’accompagne d’un large sourire, et qui vous répond avec chaleur : « bonjour Madame, belle journée pour crapahuter ! » Il fait la circuit mais pas la course.
Et puis, nous touchons le sommet, qui domine les montagnes et permet au loin d'apercevoir Marseille ou la mer... Fantastique.
Une grimpée ardue qui nous a bien plu et que nous referons avec plaisir.
Quant au retour, ouillle ouille ouille. Le GPS, (toujours facétieux) nous propose une descente sur route d'accès aux antennes. On se réjouit de ce confort inattendu car on en a plein les pattes et les genoux qui grincent. Manque de pot, cette sympathique descente en zone militaire est interdite au public... Bon ça nous aura juste permis un grand détour pour une rando d'une sizaine d'heures...
Dimanche, petit déjeuner de rêve dans la douceur d'un soleil généreux. Trop bon. Nous décidons d'aller à la découverte du sanctuaire de Sainte Madeleine. Une vraie promenade pour un dimanche. Le sentier est matérialisé par de larges marches. Allée des roys qui nous mène à douce allure à la voie Royale. La forêt est fouilli-feuillue, comme je les aime, totale anarchie, comme si l'homme n'avait pas réussi à la domestiquer. Oh là, là, que c'est bon tout ça. .
La Sainte Baume, j'adore ! vraiment !